La motivation des salariés : un enjeu et une vigilance !

La motivation trouve son fondement, et son origine, dans l’obligation de bonne foi et de loyauté[1] . En effet, le salarié en signant son contrat de travail s’engage à fournir une prestation de travail, et l’employeur à lui fournir un salaire et des missions.

 Au-delà, de ces considérations juridiques, par la signature de son contrat de travail, chacune des parties s’engagent à donner le meilleur d’elle-même… C’est une union !  Ce qui n’est pas toujours simple…

D’où l’enjeu important et essentiel que représente la motivation des salariés pour toute entreprise.

En effet, l’enjeu actuel pour toute entreprise sera d’identifier les différents leviers de motivation au travail et permettre ainsi à ses salariés de s’investir et se projeter dans ses futurs projets.

Certes, la situation sanitaire met mal se paradigme. Près de 24 % des cadres se disent inquiets sur leur avenir[2], la motivation n’est pas à négliger et même encore plus dans un tel contexte actuel. Selon un autre sondage réalisé par l’APEC, un tiers des salariés pensent à changer de métier ou d’entreprise. 

Par la crise, les DRH, les RH avons appris à communiquer sur l’incertain.  

Pour autant, la transparence est un élément intangible de la motivation, elle en est la substantifique moelle. Ainsi, La motivation n’est donc pas un concept abscons, mais à géométrie variable … C’est une roue de temps.

Le premier élément de la motivation, est évidement la rémunération. C’est un levier indiscutable de motivation, mais là encore pour qu’elle soit un facteur de motivation, le collaborateur doit trouver lisible la grille de rémunération.

Aujourd’hui bon nombre d’entreprises ont négocié des accords de rémunération, qui permettent, en plus des accords de branche, de déterminer la rémunération minimale de chaque collaborateur. La juste rémunération du travail accompli : tous les RH, les DRH lors des différentes négociations sur les salaires savent, oh combien, la rémunération est un élément de crispation et de cristallisation.

Selon la dernière étude de Robert Walters[3] seulement 26% des cadres français tablent sur une augmentation cette année contre 73% en 2020. Ainsi, cette étude met en exergue notamment que :

  • 38% des cadres estiment que leur métier a moins de sens et que leur motivation au travail est mise à rude épreuve.
  • la rémunération prend de l’importance comme critère d’attractivité des cadres. A la 5ème place en 2020, elle arrive en troisième position cette année (37%).

Force est donc de constater, que les professionnels des ressources humaines devront faire preuve d’audace pour mettre en place un dispositif de motivation adéquat notamment pour attirer des nouveaux profils et conserver leurs talents.  

La rémunération n’est pas le seul élément pour assurer, développer ou accompagner la motivation. En effet, l’entretien annuel d’évaluation, rencontre formelle entre le salarié et son manager et responsable des ressources humaines, est un outil de management des femmes et des hommes qui permet aussi d’améliorer la motivation et l’engagement individuel.

Cependant, cet outil tombe un peu en désuétude. En effet, de nombreuses entreprises l’ont abandonné[4] au profit d’une méthode OKR ou EAA (objectifs par résultats clefs), ou quel que soit l’acronyme qu’on lui donne. Le cap est fixé au travers d’objectifs, et les résultats constituent l’indicateur de réussite.  

Bien évidemment pour qu’un tel outil fonctionne les objectifs doivent être SMART.[5]

Bien souvent, un entretien annuel bâclé, inachevé, des objectifs non partagés nourrira chez le salarié un sentiment de frustration et donc de démotivation. Un point de détail qui revêt son importance : la fixation tardive des objectifs entraine pour l’employeur de lourdes conséquences, comme l’a rappelé la Cour de cassation tout récemment [6] .

D’autres outils sont apparus, comme l’entretien professionnel tous les 2 ans et le bilan du parcours professionnel tous les 6 ans, et ont un caractère obligatoire[7]. L’entretien professionnel devient donc un outil de gestion prévisionnel d’emploi et compétences.

Cependant, à l’heure où certaines entreprises éprouvent des difficultés, la formation peut être aussi un nouvel élément pour motiver les salariés. Un salarié qui dans le cadre de son entretien professionnel souhaite acquérir une compétence particulière et dont l’entretien y souscrit, en sera plus motivé.

Ces outils de motivation sont certes importants, mais ils n’existent que pour soutenir le projet d’entreprise et la culture d’entreprise. Ces derniers permettront aux salariés de comprendre le sens de sa mission et donc de rester pleinement motiver lorsque les évènements extérieurs se déchaineront.

Au risque d’étonner, les préceptes de SUN TZU et l’art de guerre[8] peuvent parfois s’appliquer aux Ressources Humaines : « si les ordres sont efficaces, les troupes les suivront mais si tel n’est pas le cas, ils ne les suivront pas ».  

C’est la raison pour laquelle, la culture de l’entreprise s’érige dès l’entretien avec le futur candidat : l’onboarding.  Ainsi, un salarié motivé aidera naturellement à recruter, inspirera aux candidats le désir de rejoindre son entreprise et permettra à cette dernière de dépasser et de réaliser ses objectifs.

Selon une étude réalisée par LinkedIn, 4 % des salariés quittent leur entreprise le 1er jour, tandis qu’ils sont 22 % lors des 45 premiers jours.

Il est donc essentiel de conserver un lien avec le candidat, tout au long de son arrivée mais aussi de veiller à lui expliquer la culture de l’entreprise. Ainsi, Welcome to the Jungle en est un exemple patent. Bon nombre d’entreprise utilise ce média pour communiquer, recruter, et développer leurs talents[9].

A l’inverse, une autre tendance semble se dessiner, dans le même esprit que #METOO, un compte Instagram #balancestartp, apparu en Janvier 2021 qui permet aux salariées de dénoncer certains comportements dont ils ont été victime.

Cette culture d’entreprise doit être appréhendée à « chaque étage » et auprès de chaque manager. Un manager qui communique permet à ses collaborateurs d’avoir une vision claire et cela contribue à son bien-être et à sa motivation.

Le rôle du manager est d’assurer, et maintenir cette motivation, c’est le manager qui permet l’expression de cette reconnaissance[10] et le départ d’un collaborateur est souvent le fruit d’un manager défaillant. Mais, manager n’est pas simple, c’est d’ailleurs pour cette raison que les partenaires sociaux dans leur accord national interprofessionnel du 28 février 2020 ont érigé le principe d’une certification compétences de bases liées à l’exercice du management. [11]

Enfin, le dernier élément de la motivation des salariés, qui s’est d’ailleurs accru pendant le confinement, est la possibilité de télétravailler et de bénéficier de modes de travail plus flexibles. Ces mesures ont été mises en place initialement pour limiter les interactions sociales dans les transports en commun et lieux de travail. Cependant, la crise sanitaire perdurant, ces mesures se révèlent être désormais déterminantes pour attirer et conserver les meilleurs talents. En effet, selon une étude Citrix, publiée dans les Echos : [12]

  • plus de la moitié (52%) des personnes sondées estiment que les entreprises passent à côté des meilleurs talents si elles ne proposent pas de telles mesures ;
  • 42% des personnes sondées déclarent que si elles devaient changer d’emploi, elles n’accepteraient un nouveau poste qu’à condition de pouvoir télétravailler ;
  • 57% souhaitent que le gouvernement français légifère sur le sujet.

Avec cette pandémie, nous assistons à l’émergence d’une nouvelle organisation du travail, une nouvelle culture d’entreprise dont la norme n’est plus le travail en présentiel à 100% dans les bureaux, mais une organisation qui allie présentiel et télétravail.

La nouvelle génération de travailleurs est très réceptive à ce type d’organisation car elle souhaite un meilleur équilibre entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle. Elle veut pouvoir travailler où elle veut et où elle se sent bien. Ce bien être en travaillant ne fera qu’accroître leur productivité.

Cette nouvelle organisation du travail « hybride » sera d’autant plus motivante et attractive si l’ensemble des parties trouve un juste équilibre.[13]

Cependant, la motivation d’un collaborateur résiste parfois peu à la volonté à voguer vers d’autres « cieux » et la mobilité peut constituer parfois un outil de motivation pour le collaborateur.

La motivation c’est un peu comme la courbe de gauss, elle varie perpétuellement, il est donc essentiel que nous soyons vigilants, les acteurs de l’entreprise, RH, managers, représentants syndicaux, Directions, à entretenir cette petite flamme, car finalement quel que soit notre statut, notre position, nous sommes nous aussi tous motivés par un but, une envie. Cette motivation permet aussi de dépasser les limites, et favoriser la croissance… ne dit-on que la motivation est un organisme vivant ! A défaut, nous errerions comme simple « zombie » guidé par des anciens réflexes…


[1] Article L1222-1 du code du travail qui dispose « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi ». D’ailleurs, cette règle découle de deux dispositions du code civil, à savoir les articles 1104 et 1194 du code civil.  La Cour de Cassation a rappelé à plusieurs reprises le contour de l’obligation de loyauté (Cass. soc., 14 déc. 2005, n° 03-47.970, ou encore (Cass. soc. 15 janvier 2015, n° 12-35072 et Cass, Soc, 31 octobre 2012, n°11-17695 et tout récemment Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 février 2021, 19-14.315.
[2] Enquête Apec en ligné menée en décembre auprès d’un échantillon représentatif de 2000 cadres du secteur privé – Baromètre Apec des intentions de recrutement et de mobilité des cadres disponible.  Toutes les études de l’Apec sont disponibles gratuitement sur le site www.corporate.apec.fr.
[3] Salaires 2021 : ceux qui seront malgré tout augmentés… et les autres https://www.cadremploi.fr/editorial/actualites/actu-emploi/salaires-2021
[4] Bientôt la fin de l’entretien annuel d’évaluation ? – les échos le 10 décembre 2018.

[5]  SMART signifie Intelligent en anglais, chaque Lettre renvoi à un adjectif Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste, et Temporel permettant de définir chaque étape d’un projet et d’accompagner la prise de décision.

[6] Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 novembre 2020, 19-17.246, Inédit

[7] Article L6315-1 et suivants du code du travail

[8] une préférence pour cette très belle édition, de 2006, publiée chez Evergreen de Samuel. Griffith.
[9]  welcome to the jungle chez Vuibert de m. j.clédat et l.vitaud
[10] L’expression « la reconnaissance est notre salaire émotionnel est parfaitement justifié », propos de Madame Kathia David : http://mieux-lemag.fr/reconnaissance-moteur-motivation/
[11] accord national interprofessionnel du 28 février 2020 portant sur diverses orientations pour les cadres.  une certification  – Cléa manager- a été érigée, page 6 de l’accord.
[12] télétravail : le coronavirus lui donne un vrai coup d’envoi – les échos du 6 avril 2020
[13] Cf. notamment Accord national interprofessionnel du 26 novembre 2020 pour une mise en œuvre réussie du télétravail qui contient certaines mesures financières, mais aussi  voir l’article sur les échos publié le 26 nov. 2020, et le communiqué de presse disponible sur https://travail-emploi.gouv.fr.

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